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LE MELLOIS Le Blog de MELLES
24 avril 2013

Une page d' Histoire ...

Comté et Maison de Comminges entre France et Aragon au Moyen Age

Du Xeme siècle, où il est obscurément entré dans l'histoire, à 1502, date de son incorporation définitive au domaine royal, le comté de Comminges a formé un de ces petits États féodaux pyrénéens dont les destinées ont souvent été mêlées à celles des pays catalans et aragonais, ses voisins méridionaux.

Situé, en effet, au coeur des montagnes pyrénéennes dans l'éventail des vallées de la haute Garonne et de ses affluents despays de Luchon et de CastiUoa, il était au contact immédiat des hauts cantons du versant hispanique, Pallars, Ribagorza, Esera.

Certes, la muraille montagneuse est, dans cette région, la plus élevée de la chaîne et aucune grande voie de passage n'y relie les deux versants. Mais le Moyen Age ne s'effrayait pas de « ports »élevés et d'accès difficile. On passait du Couserans au Pallars par le port de Salau , de Luchon, on gagnait les vallées méridionales  par le val d'Aran et la Bonaïgue, le port de la Glère ou le port d e Venasque ; entre le haut Larboust et l'Esera, on utilisait couramment le port d'Oo à 3000 mètres d'altitude. Ces hauts passages suffisaient aux faibles relations commerciales entre les régions frontalières et à leurs besoins pastoraux. Il n'en fallait pas plus aussi pour que leurs vies politiques aient des points de rencontre.

Sa situation au centre de la chaîne, entre le comté de Toulouse et ses rivaux de Barcelone et d'Aragon d'abord, entrela France capétienne et la royauté aragonaise ensuite, a ainsi valu au comté de Comminges de tenir une place dans les rapports franco-aragonaais et à sa maison de jouer un rôle dans la question des Pyrénées au Moyen Age. Sans être aussi important que celui qu'ont eu les maisons de Foix et de Béarn, ce rôle mérite, nous semble-t-il, de ne pas être laissé dans l'oubli.

* * *

L'indifférence du Moyen Age. pour la barrière montagneuse comme limite politique et les antécédents du rôle médiéval du

Comminges entre France et Aragon s'aperçoivent dès le ixe siècle carolingien, ce « siècle des commencements ». C'est ..alors, qu'à peine achevée la conquête frañque des glacis subpyrénéens méridionaux, un hispanus, accouru au service de Charlemagne,nommé Aznar, son frère Sanche Sánchez et son fils Galindo cherchèrent à grouper sous leur autorité un vaste ensemble de comtés et de pays à cheval- sur les Pyrénées centrales et occidentales :Urgel, Pállars, Ribagorza, Aragon, Gascogne, Toulousain —groupement fragile, presque aussitôt .détruit que constitué, mais dont la carte montre la place de cheville que le Comminges pouvait y tenir et, par conséquent, l'enjeu qu'il dût représenter. On ignore son véritable sort : sans doute finit-il, avec le Pallars, le Ribagorza et le pays de Foix, par faire partie du grand comté dont le comte de Toulouse Frédelon réussit lui-même à s'assurer la possession sur les deux versants de la chaîne centrale.

L'obscure gestation du comté féodal s'est déroulée pendant ces xeme et xieme siècles si pauvres en documents méridionaux. Mais lorsque au début du Xeme siècle apparaît, solidement établi sur des châteaux montagnards, le premier grand comte de la lignée commingeoise, Bernard 1er, c'est tourné à la fois vers des problèmes hispaniques et aquitains que l'histoire nous le fait voir.

Bernard Ier passa une grande partie de son règne au delà des Pyrénées, déployant une infatigable activité au service de la reconquête aragonaise. En août 1114, il participait, aux côtés de ses voisins de Béarn, de Bigorre et de Lavedan et des barons normands conduits par le comte Rotrou, à la prise de Tudèle ; en1118, il repartait à l'appel de Gélase II guerroyer, sous Gaston de Béarn, dans la plaine de l'Èbre et entrait, probablement des premiers, dans Saragosse le 19 décembre. Il n'oublia pas pour autant que les intérêts pastoraux des vallées de son comté étaient liés à ceux des plaines de la Gascogne toulousaine". Aussi épousa-t-il vers 1120, Dias, héritière de Muret et de Samatan,préparant ainsi l'union au Commingés de ces deux seigneuries et plaçant sa politique dans le sillage de Toulouse.

La grosse question à laquelle s'attaqua l'actif comté de Comminges fut néanmoins celle du val d'Aran. Le val d'Aran est, on le sait, cette partie supérieure de la vallée dé la Garonne enclavée aujourd'hui en territoire espagnol. Il avait fait partie de l'antique Civitas Convenarum et il releva toujours au Moyen Age du diocèse de Commingés, dont la tête était à Saint-Bertrand . Mais, au début du Xeme siècle, il n'était pas aux mains de la famille de Comminges. Il était passé , on ne sait comment, aux comtes de Ribagorza, et en 1131 et 1132 Alphonse Ier d'Aragon,le Batailleur, affirmait sur lui ses droits de suzerain. Évidemment,le fait que cette haute conque de la Garonne fût rattachée au Ribagorza et à l'Aragon dont elle est séparée par la masse des Encantats et de la Maladetta choquait certainement beaucoup moins les hommes du Xeme siècle, habitués à bien d'autres chevauchements territoriaux, que nos contemporains encore attachés au concept de la frontière naturelle.

Cependant, le val était tout de même, le prolongement du Bavartès et le complément du pays de Luchon, tous deux assises de la seigneurie commingeoise et, si peu géographe qu'ait été un baron montagnard de cette époque, c'était là une chose qu'il ne pouvait pas ne pas sentir.

Bernard Ier avait d'ailleurs également rencontré Alphonse Ier de ce côté-ci des Pyrénées dans un conflit où il avait soutenu le vicomte d'Aure contre le comte de Bigorre. L'Aragonais, seigneur de ce dernier, lui avait imposé sa raison . Aussi, lorsqu'éclata en 1134 la crise de la succession, aragonaise, le vit-on se multiplier pour parer à cette menace venue du Sud et pour justifier, semblet-il, le coup de force qu'il préparait contre le val.

Pendant l'hiver 1134, il alla à Sâragosse où il rencontra, avec les comtes de Toulouse, de Foix, d'Urgel et de Pallars, Alphonse VII de Castille,vainqueur des Aragonais, et le 26 mai suivant assista à Léon au couronnement de ce dernier comme "empereur". rien ne dit qu'il lui prêta hommage ; mais sans doute chercha-t-il à amorceravec lui une négociation au sujet du val.

En 1143, c'est le voyage de Catalogne qu'il fit, probablement pour la même raison, auprèsde RaimondBérenger-IV. Mais le comte de Pallars, Artau,  avait aussi des visées sur la haute-vallée de la Garonne. Enfin, en1144, notre Commingeois avait réussi. Un acte du 1er janvier 1145 ,le dit Bernardo comité nobilissimo dominante in terra Convenarum et in Saves et in  Coserans et in Aranno, la question aranaise était cependant loin d'être close.

Le comte de Comminges n'avait occupé le val qu'à la faveur de la crise aragonaise et parce qu'il avait senti derrière lui le comte de Toulouse Alphonse Jourdain. Ainsi, par cette affaire- locale s'était-il placé sur le terrain de la rivalité entre les maisons de Barcelone et de Toulouse et avait-il poussé le comté dans l'engrenage de ce vaste conflit pour l'hégémonie pyrénéenne et méridionale.

Les ambitions et les menées transpyrénéennes de la maison de Barcelone n'étaient pas chose neuve au milieu du Xeme siècle.Somme toute, à peine sortis de la vieille marche carolingienne de Gothie, les Barcelonais avaient songé à refaire son unité à leur profit. Une politique matrimoniale bien conduite avait introduit les ancêtres de Raimond Bérenger IV en Languedoc. Raimond Bérenger III, son père, également par un heureux mariage en 1113 avec Douce, héritière de Provence, avait même installé les Catalans au delà du Rhône et en Rouergue.

La royauté aragonaise de son côté, s'était créée, au temps du Batailleur, une clientèle féodale sur le versant bigourdan et béarnais des Pyrénées.

L'union de la Catalogne et de l' Aragon, après la crise de 1134-1137, rendait cette politique d'expansion des deux maisons plus redoutable encore pour ceux qui, dans le Midi languedocien et gascon, ne se souciaient pas de faire son lit.

Partout sur son chemin Barcelone trouvait Toulouse. C'est à Toulouse qu'elle disputait l'hommage des barons languedociens ;c'est à la maison de Saint-Gilles qu'elle avait enlevé l'héritage provençal.

Mais le comte de Toulouse Alphonse Jourdain était de trempe à accepter la lutte. Il avait en 1125 récupéré une partie de la Provence, le marquisat au- nord de la Durance.; contre les Catalans, il avait d'abord lié partie avec l'Aragon ; en 1134, il se tourna vers la Castille. A ces alliances, Barcelone répondit en se rapprochant de l'Aquitaine des Guilhems, puis des Plantegenets, en gagnant à elle, en 1150, le vicomte de Béziers et de Carcassonne,Trencavel,et en installant en Béarn, en 1154, un baillistre durant la minorité de Gaston V. Les jeux étaient serrés.

Dans ce conflit, le comté de Comminges était, jusqu'aux alentours de 1134, resté à l'écart, moins protégé, sémble-t-il, par ses montagnes que par sa situation aux confins des trois zones d'ambition de Barcelone, d'Aragon et de Toulouse. Bien plus, aucun engagement vassalique consenti par ses comtes n'est connujusque-là. Bernard Ier avait senti poindre une menace du côté aragonais.

Le mariage de Muret, vers 1120, avait rétabli l'équilibre : par Muret et Samatan, mais pour ces deux seigneuries seulement, les comtes étaient entrés dans l'arrière-vassalité toulousaine. Après le coup d'audace sur le val d'Aran contre Barcelone,le comté pourrait-il cependant éviter d'être entraîné dans la grande rivalité méridionale?

Nous ignorons, après la disparition de Bernard Ier, l'attitude de ses fils Bernard II et Dodon Bernard dans le conflit ouvert entre Raimond V, fils d'Alphonse Jourdain, et Raimond Bérenger IV.

Un acte du mois de décembre 1159 nous montre le second à Gérone auprès du comte de Barcelone. Était-il avec Trencaveldans le clan des adversaires du comte de Toulouse? ou servait -il de médiateur entre les deux rivaux pour la négociation de la trêve qui fut justement conclue en ce mois de décembre 1159 et pour celle de la paix qui en sortit en mai suivant?

C'était deTrencavel que Dodon était, d'une part, vassal direct pour Muret ;mais était-il possible, d'autre part, qu'il ait suivi le Garcassonnais dans sa rébellion contre le comte dé Toulouse, alors qu'il venait lui-même d'épouser une fille d'Alphonse Jourdain?

On verrait bien, dans ce cas, le comte de Comminges avoir offert ses bons offices pour la pacification ; et s'il en fut réellement ainsi, Dodon aurait bien vu où était l'intérêt et la vocation de son comté entre les puissances rivales et aurait, tracé la voie de la politique de son fils Bernard.

Il était, en effets réservé à Bernard IV de réaliser entre Toulouse et Barcelone une politique de souple- équilibre qui sauve gardât l'individualité du Comminges et d'établir par une laborieuse diplomatie et une activité sans relâche l'entente entre les adversaires, d'hier devant le péril commun de la Croisade albigeoise.

La situation n'était cependant pas brillante lorsque Dodon abandonna à son fils aîné, en 1176, le comté, amputé du Couserans et du Savès donnés à des cadets. La guerre méridionale avait repris en 1166 depuis que Raimond V avait prétendu recueillir la succession de Raimond Bérenger de Provence; des trêves l'avaient apaisée un moment en 1173-1174, mais les hostilités avaient recommencé en 1175. Alphonse II, comte de Barcelone et  roi d'Aragon, poursuivant à fond la politique transpyrénéenne de ses prédécesseurs, avait passé la chaîne centrale. Pendant l'automne 1175, il avait parcouru, sinon occupé, le comté de Comminges, et, d'un camp situé sur une hauteur de la régionde la Sâve, il avait donné en fief à Centulle  de Bigorre le val d'Aran, repris donc entre temps aux Commingeois .

Et le jeune Bernard reçut, aussitôt son avènement, un custos comitatus,Guilhem d'Aure, peut-être dévoué à la cause catalane.

En avril 1176, un nouveau traité interrompit le conflit, puis, en1179, la guerre reprit partout en Provence, en Rouergue et en Languedoc, Bernard IV, bien que neveu de Raimond V et son vassal direct pour Muret depuis la fin de Trencavel, entra alors dans la coalition catalane; prise de parti peut-être obligatoire,mais peut-être aussi calculée par le jeune comte pour réaliser ses premières ambitions. De fait, vers 1182, Bernard épousait, avec l'assentiment du roi d'Aragon, Stéphanie, héritière de Bigorre, et prenait quelque temps après les titres de ce comté.

Le Commingeois se tourna aussitôt vers Toulouse et, répudiant Stéphanie, voulut garder le comté de Bigorre en écartant la fille, née de ce mariage, Pétronille. Alors Alphonse II agit avec déci-sion.

En vertu de ses droits de suzerain de Bigorre, il prit la tutelle de la jeune comtesse, la fiança, au mois de septembre 1192, au vicomte de Béarn Gaston de Moncade, et donna le comté à ce dernier, excepté le val d'Aran qu'il retint expressément . Après cette dure semonce, Bernard IV s'abstint de prendre parti dans la lutte qui reprit en 1193 entre Raimond V et le roi d'Aragon.Malgré ces débuts difficiles et en dépit de cette pression extrêmement violente de la politique aragonaise, lorsqu'en 1196 disparut Alphonse II, le comté de Comminges, seul de tous les comtés pyrénéens et languedociens, sortit néanmoins sans hypothèque de la lutte méridionale. En Béarn était installée la maison catalane de Moncade ; Bigorre, Foix, Razès, Carcassonne, Béziers reconnaissaient la suzeraineté aragonaise; seul le comté des Bernarda avait encore pu se garder de tout lien féodal entre les deux mouvances concurrentes.

C'est à partir de 1197 que le comte de Comminges commença à donner sa mesure. À côté de son cousin Raimond VI  et du nouveau roi d'Aragon Pierre II, il s'est alors hissé aux premiers plans. Entre eux, surtout, il se fit l'artisan du rapprochement. Après sa rupture avec Stéphanie de Bigorre, Bernard avait épousé la fille d'un autre baron pyrénéen, Comtes de Labarthe,mais ce second mariage fut annulé quelques mois à peine après sa célébration, en novembre 1197, par le propre oncle de la jeune comtesse, l'évêque de Comminges Raimond-Arnaud, et, le mois de décembre suivant, Bernard IV se rendait à Montpellier où il épousait Marie, fille de Guilhem VIII, seigneur de cette ville.

On connaît l'histoire de cette malheureuse princesse, fille d'un premier mariage de Guilhem VIII avec Eudoxie Comnène, que sa belle-mère Agnès de Castille voulait exclure de la succession de Montpellier au profit de son jeune fils Guilhem. A cet effet, elle lui avait fait épouser, à peine âgée de douze ans, Barrai, vicomtede Marseille, en la faisant renoncer à ses droits. Mais Barrai était mort peu après le mariage et l'opération était à recommencer.

Dans l'affaire du nouveau mariage de Marie avec Bernard, il parait donc très probable que les avances soient venues de Guilhem VIII et de sa femme. Mais, pour que notre Commingeois ait si rapidement et si favorablement écouté ces avances et qu'il ait accepté une union avec clause de renonciation aux droits de sa future épouse, c'est qu'il avait lui-même assurément un projeten tête. Il est même permis de  penser qu'à l'occasion de ce mariage se monta une vaste intrigue entre le comte de Comminges,Raimond VI de Toulouse et Pierre II d'Aragon, et qu'en réalité le seigneur de Montpellier et sa femme conclurent un marché de dupes.

Le contrat et la renonciation à la succession de Montpellier furent donc passés le même jour de décembre en présence de Raimond VI et de l'évêque de Comminges, qui avait si complaisamment annulé le précédent mariage du comte. Quelques semaines après la cérémonie, à la fin du mois de février 1198, Bernard IV et Raimond VI rencontraient à Perpignan le jeune roi d'Aragon, sous les auspices de Bérenger, archevêque de Narbonne,ancien évêque de Lérida.

C'est lors de cette entrevue que se dévoilèrent sans doute les desseins des deux cousins et que le mariage montpelliérain servit en partie de base à l'entente qui s' ébaucha.La rencontre de Perpignan a marqué, en effet, le tournant des rapports de Toulouse et de Barcelone ; elle a liquidé leur longue rivalité et a été le point de départ de leur alliance. Ce n'est pas ici le lieu de rechercher les causes de ce renversement desituation ; mais il est très net que le revirement vint surtout du comte de Toulouse. Or, à l'amitié catalane, il fallait faire quelques concessions.

C'est pour servir de monnaie d'échange que l'intrigue de Montpellier paraît avoir été combinée par Raimond avec le concours de son cousin. Pierre II ne cachait pas ses vues sur Montpellier, mais, en épousant Marie du vivant de Guilhem VIII, il se serait heurté à la clause de renonciation.

Le mariage de Bernard IV dut ainsi être présenté comme une solution d'attente : le comte garderait l'héritière jusqu'au moment où la succession s'ouvrirait par la mort de Guilhem ; il la répudierait alors, et, la renonciation à la succession étant une fois de plus devenue caduque par la rupture de l'union, Pierre II pourrait la recueillir et s'assurer du même coup la seigneurie convoitée.

Si nous hasardons cette explication, c'est que trois coïncidences déjà, annulation du second mariage, mariage de Montpellier,entrevue de Perpignan, et le développement des événements de 1198 à 1204 semblent bien correspondre à la négociation d'un tel marché.

D'abord le comte de Comminges et le roi d'Aragon eurent, le 22 juillet 1201, une nouvelle entrevue. Pierre, venant de Jaca par le Béarn et la Bigorre, rencontra Bernard à Banneros, sans doute à Bagnères-de-Luchon. Et là, pourboire pour le jeu qu'il jouait, il ne saurait guère en être autrement, le comte de Comminges reçut du roi la possession du val d’Aran, objectif de sa maison depuisun siècle.

Cependant, Bernard IV dut consentir en contrepartie,car Pierre poursuivait de son côté la politique de sa lignée, l'hommage au roi d'Aragon non seulement pour le val, mais pour toute la terre commingeoise . Cela valait-il ceci? Bernard le pensait sans doute et ne fut peut-être pas fâché aussi de faire contrepoids par cet hommage à celui qu'il devait à son cousin pour ses deux seigneuries de la plaine toulousaine.

A Montpellier, cependant, Guilhem VIII manœuvrait également pour obtenir de Rome, par une feinte réconciliation avec Eudoxie, la légitimité des enfants de son second lit. Mais, si cette manœuvre avait réussi, c'était l'intrigue commingeoise qui échouait. Bernard ne menaça-t-il pas alors de faire annuler une fois de plus son union pour rendre à Marie, dans ce cas, ses droitsà la succession?

Cela expliquerait les trois mandats lancés contre lui par Innocent III à la demande de Guilhem, qui aurait eu vent de la contre-manoeuvre, et dont les menaces, au moment où elles furent notifiées au comte, ne semblent guère avoir été justifiées.

Enfin, lorsqu'en septembre 1202 Guilhem VIII mourut, Bernard répudia sa femme sous prétexte qu'il y avait entre lui et elle  des liens de parenté et que lui-même n'avait pas été séparé par le jugement de l'Église de sa première femme Stéphanie, toujours vivante — choses qu'il ne pouvait pas ignorer en 1198, prétexte en réalité choisi dès ce moment-là pour faire annuler le mariage lorsque le moment serait venu.

Alors, au mois de janvier 1204,Perpignan, à l'occasion des noces d'Aliénor d'Aragon et de RaimondVI, le comte de Comminges rencontra une nouvelle fois Pierre II. Le tour était joué. Le 19 juin enfin, en présence du comte de Toulouse, le roi épousait à Montpellier l'héritière des Guilhems. L' Aragon était à Montpellier, mais, par cet effarant maquignonnage, le comte de Comminges avait gagné le val d'Aran, consolidé sa position d'équilibre entre Toulouse et Barcelone et  scellé une entente dont l'utilité n'allait pas tarder à être démontrée.

Bientôt après se déclenchait, en effet, la Croisade albigeoise.

Bernard IV a continué à jouer pendant la crise le rôle d'agent de liaison entre les deux princes méridionaux. Au synode de Lavaur en janvier 1213, PAragonais intervint en faveur du comte, accusé d'hérésie . Le 27 janvier, Pierre II recevait à Toulouse le serment de fidélité de Raimond VI et du Commingeois . Mais, le roi de retour outre-monts, la situation militaire était devenue difficile au printemps pour les Méridionaux.

Entre deux combats, Bernard IV courut alors à toute bride inciter le prince à activer ses préparatifs. Il le rencontra le 4 juillet, au monastère de Sigena,et était de retour quinze jours après sous les murs de Toulouse. Intervention décisive peut-être, car à la fin du mois d'août Pierre II passait le Somport. Ce fut alors la campagne de Muret :le sort de la Croisade et de la France méridionale s'est joué le 12 septembre 1213 sous les murs du château des comtes de Comminges.Après la défaite, Bernard continua la lutte auprès de Raimond Vl.Partout où on combattit, partout il fut et petit à petit il recouvra ses terres qu'avait occupées Simon de Montfort. A sa mort, le 22 février 1225, le comté de Comminges sortait intact des deux grandes crises de l'histoire méridionale du Xeme et du XIeme siècle. Certes, le val d'Aran était revenu, en 1220, sans doute parce que l'hommage comtal n'avait pas été renouvelé à Jacques Ier, dans la possession immédiate de l'Aragon. Du moins le vieux comté n'avait-il rien perdu et ne mouvait-il d'aucun seigneur.

Trois mobiles ont ainsi déterminé la politique « pyrénéenne » des comtes de Comminges du xie et du Xeme siècle.

S'assurer d'abord la possession du val d'Aran ; entreprise qui a finalement échoué. Éviter de trop s'engager, malgré ce premier objectif qui les opposait à l'Aragon, dans le conflit des maisons de Barcelone et de Toulouse ; politique de bascule que la situation même de leur comté a rendue possible et à laquelle son succès a, en partie été dû. Enfin, au moment où le conflit pyrénéen, languedocien et provençal devenait un péril pour le Midi occitan tout entier,Bernard IV a su concilier les intérêts de son haut pays et ceux de la féodalité méridionale en se faisant, par une diplomatie peut-être pas toujours très reluisante, l'artisan du rapprochement des adversaires transpyrénéens.

Mais la disparition de Pierre II et l'entrée en scène de la royauté capétienne au lendemain de celle du grand comte de Comminges devaient mettre fin à ces combinaisons méridionales et placer les successeurs de Bernard IV devant des situations toutes nouvelles.

***

Au XI eme siècle, avec Jacques Ier, la royauté aragonaise a orienté sa politique vers d'autres directions que les Pyrénées ; par le traité de Corbeil de 1258, elle abandonna, on le sait, ses prétentions languedociennes. Mais, à la place de la maison de Toulouse, Alphonse de Poitiers d'abord, les sénéchaux capétiens ensuite sont alors devenus les voisins immédiats du comté de Comminges.

Bernard V, en 1227, fit sa soumission à Louis VIII. Son fils Bernard VI, menacé par des ennemis de l'Ouest, fit hommage en 1244 à Raimond VII pour tout le comté et devint en 1271 le vassal direct de la Couronne. Pendant tout ce  siècle et au début du siècle suivant, les comtes de Comminges furent, en outre, absorbés par des séries de questions successorales qui tournèrent également leurs regards beaucoup plus vers le Nord, et l'Ouest que vers les montagnes.

En 1280, une jugerie royale était,enfin, organisée au coeur même des domaines commingeois autour de la bastide de Montréal-de- Rivière (Montréjeau). Aussi, lorsqu'en 1285 se posa à nouveau la question du val d'Aran, ce n'est plus, comme autrefois, la maison comtale, mais la royauté capétienne elle-même qui la fit sienne.

La haute vallée de la Garonne, retombée dans le domaine immédiat de la couronne d'Aragon depuis 1220, avait échue, à la mort de Jacques Ier (1276), à son fils aîné le roi d'Aragon.

Cette partie du document historique " Un peu d'histoire entre COMMINGES et VAL d' ARAN" nous est communiquée par  Claude et René DEJUAN.

La seconde partie  " BULLETIN HISPANIQUE" sera diffusée lors d'un autre billet si vous le souhaitez .


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